Goûter. L'idée est la langue du jour,
elle parle et se parle entre quatre lèvres,
lèvres des cordes qui vibrent
et lèvres qui dessinent ce qu'elles disent
dans le paysage plissé du visage;
la langue habite la bouche
où elle touche à tout tout le temps,
bouche qui parle dans l'embrasure
des lèvres qui s'embrassent et se caressent,
bouche qui nous donne à goûter
la saveur du sexe des mots,
"ce sexe qui n'en est pas un"(Luce Irigaray),
celui où les lèvres, à peine entrouvertes,
vont et viennent, se touchent,
et laissent sonner, se répandre,
couler l'onde sonore à travers les cavités
du chenal où se timbre la voix,
où résonne le corps sonore
qui s'ouvre et qui se ferme,
qui s'entrouvre pour laisser passer
des mots qui n'ont pas le dernier mot,
des phrases qui ne cessent de phraser,
des mots qui n'oublient pas les lèvres
et qui, comme elles, continuent d'aller
et venir et de se retoucher
dans le partage des voix.
Quand ici les lèvres
de l'idée et du jour se parlent,
elles donnent à savourer
la blancheur du rouge
qu'elles mettent à vos jours.
Goûtez le plaisir
des lèvres roses de vos aurores.

P.M.P.